Josie Maboul sort de l’ombre

lampe autocollanteLe camion de déménagement tournait au bout de la rue. Enfin, j’étais chez moi! Façon de parler, en fait j’étais chez mon banquier. Je serai chez moi dans 25 ans au plus tard. Jusqu’au soir, pleine d’entrain, je déballais des cartons et organisais mon cocon qui fleurait bon la peinture fraiche. Fatiguée, mais heureuse, je m’étalais dans mon grand canapé aubergine tout neuf pour siroter un verre de vin que je savourais autant que le calme de la rue. Deux verres plus tard, je sombrais dans un sommeil réparateur.

Quelques heures plus tard, j’étais réveillée en sursaut par un bruit métallique. L’appartement était plongé dans l’obscurité complète. Je ne me souvenais pas avoir éteint les lampes avant de m’endormir. A tâtons, je trouvais un interrupteur mais il ne fonctionnait pas. Je tentais ma chance avec son voisin. L’appartement restait plongé dans le noir et les bruits métalliques continuaient. Pas très rassurée, je m’approchais d’une des fenêtres donnant sur une rue éclairée par des lanternes électriques comme on en trouve dans les quartiers historiques des villes. Apparemment la coupure d’électricité ne concernait que ma nouvelle maison.

Où se trouvait la boîte à fusibles? Mentalement, je balayais l’appartement des yeux. Ah oui, à côté de la porte d’entrée. Je l’ouvrais et testais tous les fusibles en les éclairant avec l’écran de mon téléphone portable. La lumière ne voulait pas revenir. Des suites de coups avaient remplacé les bruits métalliques. Je n’étais pas particulièrement trouillarde, mais je commençais à avoir peur. Je n’osais pas descendre pour demander de l’aide à mes voisins du dessous. Je craignais que des cambrioleurs se soient introduits dans la maison.

Rencontre du troisième type

Hors de question d’aller me coucher et de faire comme si de rien n’était. Aucune lumière ne filtrait dans la cour arrière de ma nouvelle adresse. J’allumais des bougies. L’appartement pris une allure lugubre. Les ombres dansaient le long des murs. Je regrettais d’aimer les films d’horreur. Il ne me restait plus qu’à attendre. Je me serrais bien servie un verre de vin pour me détendre, mais je tenais à garder toutes mes facultés mentales face à ce qui risquait de se produire.

Le moindre bruit me faisait tressaillir. Je commençais à m’imaginer que la maison ne voulait pas de moi quand une vive lumière blanche traversa une de mes fenêtres. Si je n’avais pas été tétanisée, j’aurais sans doute poussé un cri d’horreur. Derrière la fenêtre se découpait à présent une silhouette humaine. J’étais pétrifiée dans mon canapé: un cambrioleur! Comment avait-il grimpé jusqu’au deuxième étage? Et s’il ne voulait pas partir? Mon cœur allait défoncer ma poitrine. Soudain, une voix de femme me demandait d’ouvrir la fenêtre…

Et quoi encore? Mon code de carte bancaire aussi? Je menaçais l’ombre de prévenir la police. Elle m’expliquait qu’elle était ma voisine du dessous et qu’elle s’était enfermée dans la cour en voulant vérifier les fusibles généraux pour rétablir l’électricité. La bonne excuse! J’empoignais la bouteille de vin restée sur la table basse du salon et m’approchais de la fenêtre. Mon cœur battait toujours aussi fort et une sueur froide dégoulinait dans mon dos.

L’ombre me dit qu’elle était en équilibre sur une escabelle et que ses jambes devenaient douloureuses. Elle me suppliait de lui ouvrir. Je lui demandais de se montrer. Elle pointa sa lampe torche sur son visage. Le double vitrage me séparait d’une vieille femme hirsute en robe de chambre élimée à fleurs. Pas vraiment le portrait d’un cambrioleur. Je me souvenais alors que l’agent immobilier m’avait dit lors de ma première visite de l’appartement que le rez-de-chaussée était habité par une gentille vieille dame. Rassurée, j’ouvrais la fenêtre et hissais ma nouvelle voisine dans mon appartement. C’est ainsi que je fis la connaissance de Josie Maboul.

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