Fête nationale: Josie s’envoie en l’air

NotrIMG_1795e chère voisine voulait côute que côute gagner la guerre qu’elle avait elle-même déclarée au Gimme Shelter. Un p
rospectus déposé par les pompiers du quartier lui a donné une nouvelle idée pour satisfaire son besoin de vengeance. Le prospectus renseignait sur le bon usage des pétards et autres feux d’artifice à l’occasion de la fête nationale à venir. Ces fusées, si jolies à regarder exploser dans le ciel, pouvaient faire de gros dégâts quand elles étaient utilisées à mauvais escient. Cela plut beaucoup à Josie Maboul. Immédiatement, une idée a germé dans son esprit malade et une sorte d’allégresse l’a envahie.

La veille de la fête nationale, un bal avait été organisé sur la petite place au pied de l’église. Des guirlandes multicolores et des lampions serpentaient entre les platanes qui bordaient la place. Un orchestre reprenait des airs de musette et de rockabilly. Il faisait chaud et les verres s’entrechoquaient près des buvettes. A 23 heures,un feu d’artifice devait être tiré. Pour l’occasion, le patron du Gimme Shelter avait installé une échoppe sur la place où il distribuait des cocktails.

Tout le quartier, sauf Josie. Elle avait dû aller passer la nuit dans un hôtel en dehors de la ville comme chaque fête nationale, comme chaque Saint Sylvestre. Elle réservait sa chambre d’une année à l’autre. Toujours la même chambre dans le même hôtel depuis des années. Nous n’avions donc pas à nous inquiéter de voir débarquer la police ou une Josie Maboul folle furieuse demandant qu’on baisse le volume de la musique, que l’on se taise ou que chacun rentre chez soi.

Explosion de rire

Nous faisions la fête en toute sérénité. Tant et si bien que les sapeurs-pompiers ont oublié de tirer le feu d’artifice à 23 heures comme prévu. Trois détonations nous ont rappelé à l’ordre. Elles provenaient de notre petite rue. Les sapeurs-pompiers et quelques hommes du quartier, dont le patron du bar, sont partis en direction du bruit. Nous avions été tirés de notre joie comme on est réveillé en sursaut d’un beau rêve. Les musiciens ont arrêté de jouer.

Quelques minutes après le départ des hommes, un grand éclat de rire a retenti au loin. Puis un deuxième et un troisième, suivi d’un éclat de rire général. Nous étions rassurées d’entendre les hommes rire, mais aussi très curieuses de savoir ce qui les faisait rire. La femme d’un pompier et moi avons rejoint les hommes. Du coin de la rue, nous avons aperçu les hommes en demi-cercle face au café dont la porte d’entrée avait été arrachée. Une poubelle était en feu et une jardinière avait volé en éclats. Au milieu de la scène, une Josie Maboul encore plus hirsute qu’à son habitude, le tablier et le visage couverts de suie. Quelle bêtise avait-elle encore bien pu commettre et comment cela se faisait-il qu’elle n’était pas à l’hôtel ?

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Deux pompiers l’ont raccompagnée chez elle en la soutenant. Pour la toute première fois, Josie Maboul était silencieuse. Elle paraissait sous le choc. Un médecin a été appelé pour prendre soin d’elle.

Au même moment, le patron du café est sorti de son établssement, sa porte d’entrée à moitié calcinée sous le bras. Elle avait été projetée contre le bar et avait renversé des chaises et des objets sur son passage. En son centre, là où se trouvait la fente pour déposer le courrier, se trouvaient les restes calcinés et encore fumants de deux grosses fusées. Dans la poubelle où le feu avaient été éteint par un pompier, se trouvaient également des restes calcinés de fusées.

Après avoir absorbé un calmant et un grand verre de goutte, Josie accepta de se confier au médecin. Le matin même, elle avait pris les quatre fusées dans la caserne des pompiers et les avait cachées dans son grand cabas. Elle s’était ensuite terrée chez elle toute la journée jusqu’au soir pour faire croire à son départ à l’hôtel comme chaque année. Elle n’avait pas bougé jusqu’à ce que la fête batte son plein et que l’heure du feu d’artifice approche. Elle s’était ensuite faufilée discrètement hors de la maison, son cabas sous le bras et un briquet dans la poche.

Ca va péter!

Elle avait d’abord placé – en forçant en peu – une première fusées dans la fente de la boîte à lettres de la porte d’entrée du bar. Puis une deuxième. Elle s’apprétait à y glisser une troisième quand un bruit la fait sursauter. La fusée qu’elle tenait est allée buter contre une jardinière qui tomba et se brisa au sol. Un vieux Monsieur avait claqué la porte en sortant d’une des maisons voisines pour aller rejoindre la fête. Prise de panique d’être débusquée, Josie Maboul a accéléré le mouvement.

Persuadé que le feu d’artifice des pompiers serait tiré à 23 heures pilles et n’aurait pas une minute de retard, Josie alluma les mèches des fusées placées dans la porte à 23 heures zéro zéro. N’entendant pas de déflagrations venant de la place du quartier, elle réalisa sa bêtise et s’empressa d’allumer les deux fusées restantes et de les balancer dans la poubelle pour éviter de se brûler où qu’elles ne lui explosent entre les mains. Mais il était déjà trop tard pour courir ou se mettre à l’abri.

Les fusées plantées dans la porte l’ont sortie de ses gonds en s’envolant et sont allées exploser en paillettes roses au dessus du bar. Au même moment, la poubelle débordait d’étincelles blanches et de détritus enflammés. Josie avait eu chaud dans tous les sens du terme. Elle avait été soufflée par la déflagration et ses oreilles bourdonnaient. Les rires des hommes qui l’encerclaient semblaient lui venir de très loin et tout tournait au ralenti.

Intérieurement, elle était en rage, mais elle était incapable de l’exprimer. Elle se résigna donc à se laisser raccompagner chez elle par les pompiers. Mais elle n’avait aucunement l’intention de baisser les bras. Elle finirait bien par faire fermer le bar. Un jour, elle y arriverait, elle en était certaine.

 

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