Adolescente, Josie Maboul avait aimé un jeune homme qui faisait du vélo. Leur idylle était morte dans l’œuf le jour où Josie l’avait renversé en voulant le suivre en voiture. Après ce tragique accident qui avait changé à jamais le cours de sa vie, Josie n’avait plus jamais voulu conduire elle-même un véhicule à moteur. Elle prenait donc le bus. Le ligne 27. Chaque jour, matin et soir, sauf le week-end. Elle s’installait toujours à la même place, à l’arrière côté droit sur la ventilation pour avoir frais en été et chaud en hiver. Le siège était un peu surélevé, ce qui lui offrait une vue plongeante sur les autres passagers et lui conférait un sentiment intérieur de domination. Elle y observait les portes s’ouvrir et se fermer sur des ouvriers en bleu de chauffe, des employés cravatés et chapeautés pour ressembler à leur patron, des lycéennes à couettes et des gamins en bermuda et un jour, elle le vit.
Le bus s’était arrêté devant la gare. Les portes s’étaient ouvertes, des gens étaient descendus et un homme était monté. Il s’est assis près de la fenêtre sur une des places inversées, avait posé une mallette en cuir noir sur ses genoux de laquelle il avait tiré un livre. Personne ne lisait jamais dans le bus. L’homme l’intriguait. Il tournait lentement les pages du livre jusqu’à son arrêt de bus. Josie descendait quelques arrêts après lui. Le soir, il reprenait le bus de 18h17. Josie l’y attendait déjà. Cette fois, il avait déjà son livre entre les mains. Il avait dû lire en attendant le bus.
Souvent, après cette première rencontre, Josie vit le jeune homme lire des livres plus ou moins épais aux pages plus ou moins jaunies. Parfois, il lisait le journal ou notait nerveusement des mots dans un petit carnet de molesquine. Il lui arrivait aussi de rester debout et de s’accrocher nonchalamment aux poignées qui pendaient du plafond du bus. Il en profitait pour discuter avec des hommes ou des jeunes femmes souriantes. Le visage du jeune homme s’illuminait alors, avait remarqué Josie, comme s’il était heureux qu’une personne rencontrée par hasard puisse le trouver digne d’intérêt. Il émettait un ricanement gêné aux accents de porte qui aurait besoin d’être huilée. Le jeune homme n’était ni vraiment laid, ni vraiment beau, ni grand, ni costaud. Josie le trouvait intéressant, mieux que la plupart des passagers habituels du bus de la ligne 27. Il sentait bon et s’habillait de manière élégante et moderne. Il avait également l’air plus vif et cultivé que tous les gratte-papiers ou petits comptables qui la regardaient avec dédain parce qu’elle ne portait pas de tailleur.
Lui lisait et écrivait. Josie aurait aimé savoir ce qu’il écrivait, mais elle n’osait changer de place dans le bus pour se rapprocher de lui et lire par-dessus son épaule les pages du carnet qu’il noircissait. Elle se contentait d’espérer qu’un jour, il ne trouverait pas de place à l’avant du bus et viendrait s’asseoir à ses côtés. Les semaines passaient et Josie rêvait. Certaines semaines, le jeune homme n’attendait pas à l’arrêt de bus, ce qui rendait Josie très triste. Elle s’était habituée à cette rencontre quotidienne, même si lui ne s’était sans doute même pas aperçu de sa présence dans le bus sur le siège surélevé par la gaine de ventilation. Josie n’avait pas encore appris à attirer l’attention d’un homme et elle n’avait posé son dévolu sur une proie facile. Le jeune homme ne levait son nez de ses livres que pour admirer des jeunes femmes sexy aves leurs cheveux bien mis et leurs lèvres carmins. Josie était trop maigrichonne, ses genoux étaient trop cagneux, son nez trop imposant et ses cheveux trop secs pour être réellement jolie.
Un samedi, Josie acheta du lipstick rouge baiser et se fit faire une mise-en-plis et un brushing. Le lundi matin suivant, elle s’installa à sa place habituelle dans le bus et attendit fébrilement d’arriver à la gare. Le jeune homme monta à bord, s’installa à sa place habituelle et tira un carnet de la poche de son veston. Il ne l’avait même pas remarqué! Un poids lourd lui écrasa le cœur et une larme mouilla sa joue avant de s’échouer à la commissure de sa lèvre peinte en rouge. Pour lui, elle ne devait être qu’une passagère quelconque parmi d’autres bonnes femmes quelconques. A quoi bon chercher à lui plaire dans ce cas?
Josie va-t-elle finalement réussir à séduire le jeune homme? Rendez-vous la semaine prochaine!
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